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Si Thoreau était copywriter

Pour écrire ‘Walden ou la Vie dans les Bois’, Henry David Thoreau s’est isolé dans une cabane, au bord de l’étang de Walden, pendant deux ans, deux mois et deux jours. Je me suis demandé ce qui se serait passé s’il vivait à l’ère des réseaux sociaux.



Las du brouhaha de sa vie civilisée dans le Massachussetts, il aurait décidé de se claquemurer au fin fond d’une forêt dans le but de renouer avec sa créativité. Et de produire un grand chef-d’oeuvre.


Il n’aurait d’abord rien réussi à écrire. Déjà parce qu’Henry aurait été FOMO : l’impression que le monde vit sa meilleure vie sans lui. Ensuite, parce que sa tête aurait souffert d’une atroce migraine, dopamine détox oblige.


Pour préparer au mieux son aventure, il aurait acheté une boîte avec serrure à retardement et ouverture automatique pour y placer la sainte-Trinité de la déconcentration : téléphone, sucreries et son IQOS.


Il aurait programmé l’ouverture au bout de 14 jours. Quand le téléphone aurait fini de purger sa peine, l’objet aurait fini illico dans les mains tremblantes d’Henry, qui se serait délecté de la découverte de mille et une nouvelles vidéos.


Quitte à ne pas réussir à se débarrasser de ce vampire qui se nourrit de notre attention, Henry s’en serait servi à son avantage. Il se serait inscrit sur TikTok, Instagram et LinkedIn pour “build in public” comme on le lui aurait mille fois conseillé.


Un type qui s’isole dans les bois, au coeur d’une nature à couper le souffle, et qui écrit, forcément ç’aurait été un carton ! Il aurait plu des followers sur tous ses comptes. Un déluge je vous dis.


Au bout de deux ans, il aurait sorti son oeuvre. Sauf qu’elle ne se serait pas appelée ‘Walden ou La Vie dans les Bois’ mais ‘Comment j’ai gagné 1 million de followers dans les bois’.


Plutôt qu’une oeuvre qui marque des générations sur deux siècles, ç’aurait été un guide, une formule pour réussir que toute sa communauté aurait acheté. Mais que personne n’aurait appliqué. Surtout : que tout le monde aurait oublié après le lancement.


Enfin, Henry aurait perdu l’envie d’écrire, fatigué non pas d’avoir trop créé, mais de ne pas avoir créé assez de ce qu’il aimait.

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